Si les " progressistes " français oublient en général les origines américaines peu reluisantes de la pédagogie de projet , il est un aspect dont ils ne soufflent mot, l’admiration qu’a éprouvée le fascisme italien en la personne de Gentile, ministre de l’Education de Mussolini pour les thèses du Teachers’College et de Kilkpatrick. E.D. Hirsch, qui dédie son livre à " deux prophètes ", William Bagley et Antonio Gramsci , note : " En 1932, l'intellectuel communiste Antonio Gransci, écrivant de prison ( incarcéré par Mussolini), fut l'un des premiers à détecter les conséquences paradoxales de la nouvelle éducation "démocratique" qui mettait l'accent sur "l’ouverture sur la vie" et d'autres approches naturalistes par rapport au travail de fond et à la transmission des connaissances.
Commentaire publié sur Skhole.fr mardi 19/07/2011 en réponse à Adlib (voir son commentaire 1 : "Symptômes et remèdes ...") et son commentaire 2 : "Tout de même... merci")
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Another Brick in the Wall Part 2 (Waters) 3:56
We don't need no education
We dont need no thought control
No dark sarcasm in the classroom
Teachers leave them kids alone
Hey! Teachers! Leave them kids alone!
All in all it's just another brick in the wall.
All in all you're just another brick in the wall.
The Wall, by the Pink Floyds. Produced by David Gilmour, Bob Ezrin, and Roger Waters. Released November 30, 1979
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Quelques citations de Michel Delord sur de ce thème :
Citation 1 :
La conception classique de l'enseignement considère
- que les élèves doivent apprendre un corpus de connaissances, de l’ordre propre à la structure de chaque discipline, défini dans un document appelé programme,
- que ce savoir est transmis par des enseignants dont la fonction essentielle est d'avoir une formation de haut niveau dans la (ou les matières) qu'ils sont censés enseigner.
Cette conception est attaquée et remplacée par une autre où
- l'important n'est plus le contenu des programmes mais le pédocentrisme où " l'élève au centre" est considéré comme consommateur de connaissances (1),
- la logique des programmes n'est plus celle de la matière enseignée mais celle déterminée par le "projet de l'élève". Et comme le souci de l'enseignant ne doit plus être le contenu de la progression - qu'il ne connaît souvent même plus ou de manière extrêmement superficielle -, il se centre de lui-même sur une supposée psychologie de "l'apprenant", donnant ainsi une fois de plus prise aux destructeurs du contenu.
- l'élève - devenu le " s'apprenant "- n'est plus là pour apprendre, mais pour "construire son propre savoir" en suivant non pas le programme mais ses propres besoins dans une perspective articulée autour de la "pédagogie de projet" ...
Citation 2 :
Projet contre contenu: Tout commence aux Etats-Unis
Les Etats Unis comptaient déjà en 1985 :
- 20% de victimes de l'illettrisme parmi les titulaires de diplômes d'études supérieurs (y compris universitaires).
- 50% de victimes de l'illettrisme parmi les diplômés de l'enseignement secondaire (y compris études supérieures partielles).
- 20% de victimes de l'illettrisme parmi les titulaires de diplômes d'études supérieurs (y compris universitaires).
- 50% de victimes de l'illettrisme parmi les diplômés de l'enseignement secondaire (y compris études supérieures partielles).
Il est donc assez naturel de chercher, chez ceux qui luttent contre cet état de fait car ils en ont été les premières victimes, les explications qu’ils donnent à ce phénomène. Les sources récentes les plus importantes pour comprendre cette question sont essentiellement:
- le livre de E.D. Hirsch : The schools we need and why we don't have them, Double Day Edition, 1996. E.D. Hirsch est un des maîtres à penser (5) du mouvement "Mathematically Correct : 2+2 = 4" (6), mouvement qui ne réduit pas ses préoccupations aux mathématiques et qui a récemment eu une audience nationale aux USA puisque la lettre de protestation qu'il a rédigée pour le secrétariat d'Etat Américain à l’Education a été approuvée par plusieurs Prix Nobel, plusieurs médailles Fields et par le staff de plusieurs grandes universités américaines.
- Les textes de W.G. QUIRK accessibles sur son site (7).
Citation 3
En 1918 (12), paraît Project Method de W.H. Kilkpatrick (13) qui " psychologise " entièrement la pédagogie de projet et amène directement ce que Hirsch et W.G. Quirk appellent la Mentalité anti-contenu" (14). L’influence de Kilkpatrik va être considérable (15) et le Teachers’ College imprimera 60 000 exemplaires de sa brochure jusqu’au début des années trente (16). Cette influence déterminante s’explique aussi par la création des IUFM locaux, les Education Schools qui se créent ainsi, gagnant leur autonomie par rapport aux universités, en prétendant que l’objet central de l’enseignement n’est pas le contenu de la matière enseignée mais la méthode. (17)
Si les " progressistes " français oublient en général les origines américaines peu reluisantes de la pédagogie de projet , il est un aspect dont ils ne soufflent mot, l’admiration qu’a éprouvée le fascisme italien en la personne de Gentile, ministre de l’Education de Mussolini pour les thèses du Teachers’College et de Kilkpatrick. E.D. Hirsch, qui dédie son livre à " deux prophètes ", William Bagley (18) et Antonio Gramsci , note (19) : " En 1932, l'intellectuel communiste Antonio Gransci, écrivant de prison ( incarcéré par Mussolini), fut l'un des premiers à détecter les conséquences paradoxales de la nouvelle éducation "démocratique" qui mettait l'accent sur "l’ouverture sur la vie" et d'autres approches naturalistes par rapport au travail de fond et à la transmission des connaissances. Le ministre de l'éducation du Duce, Giovani Gentile, était, au contraire de Gramsci, un adepte enthousiaste des idées nouvelles en provenance du Teachers’ Collège, Université de Colombia (Etats-Unis). Les observations de Gramsci étaient si prémonitoires que j'ai reproduite l'une d'elle comme épigraphe de mon livre: " La nouvelle conception de l’école est dans sa phase romantique qui a exagéré de façon malsaine le remplacement des méthodes "mécaniques" par des méthodes "naturelles"..; Auparavant les élèves acquéraient au minimum un certain bagage de faits concrets. Maintenant , ils n’ont même plus ces connaissances de base à mettre en ordre…. Le plus paradoxale est que ce nouveau type d’enseignement se prétend démocratique alors qu’en fait, son avenir est non seulement de perpétuer les différences sociales mais de les transformer en casse-tête chinois " ".
L’admiration du fascisme italien pour la pédagogie de Kilkpatrick n’est pas étonnante car la pédagogie du vide qui réduit l’apprentissage à son process est bien du domaine de la manipulation car le contenu est bien la seule protection relative contre celle-ci. D’autre part, il y a une convergence étroite entre cette process pholisophy et le fascisme italien qui s’est toujours présenté comme étant l’émanation du mouvement permanent revendiquant de ne pas avoir de… programme.
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Lectures conseillées par MD :
- François Lurçat :
L’autorité de la Science, Edition du Cerf, 1995
La science suicidaire, Edition F.X., de Guibert 1999
- Liliane Lurçat :
La destruction de l’enseignement élémentaire et ses penseurs, F.X. de Guibert, 1998
Vers une école totalitaire, F.X. de Guibert, 1999
Pour F. Lurçat et L. Lurçat, également l’ensemble de leurs publications depuis les années 60.
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Voir aussi les textes de Nathalie Bulle dont certains sont explicitement consacrés à cette question :
L'éducation
- L'évolution de l'enseignement secondaire américain (PUF 1999, chap.4, p.209-282)
- Les changements idéologiques de l'enseignement dans l'école secondaire de masse (PUF 2001, p.117-145)
- Faut-il toujours moderniser l'école ? (Résonances 2004, n°5) - La pensée pédagogique moderne : entre science et politique (PUF 2005, p.117-139)
- La crise de la culture scolaire (Sociétal, 2004, p.47-51)- Vraie et fausse démocratisation de l'école (Sociétal, 2001, p.26-30)
- Les changements de l'école accompagnent-ils les changements sociaux ? (PUF, 2001, p.1-11)
- Vers un renouveau du collège unique ? (Les Cahiers français, 2008, p.37-42)
- La phobie de l'échec scolaire (Libération, 2009)
- Savoir moins pour enseigner mieux ? (Educobs, 2009)
-Histoire-géographie: un pas vers la barbarie? (Le Figaro, 14/12/09)
- Une erreur malencontreuse. Retards scolaires et réformisme éducatif des années soixante-dix (Skhole.fr, 2011)
------------------------------------------------------------Rappel : E.D. HIRSCH Jr. : textes traduits en français sur les sites de l'APPEX et de sauver les Lettres :
1- E.D. Hirsch Jr : Romancer l'enfant (dont il est question ici)
2- E.D. Hirsch Jr : le croisé inattendu
3- E.D. Hirsch Jr. : Le jargon des enseignants
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