AU COURS MOYEN : La recherche de la
rapidité
Ainsi les années du Cours élémentaire
auront été consacrées à l’étude de la cursivité de l’écriture et à l’acquisition
des automatismes cursifs. Il ne faut pas que l’enfant ait besoin de rechercher
la meilleure façon de lier entre elles les lettres de chaque mot. L’enseignement
de l’écriture cursive lui aura permis d’acquérir progressivement l’automatisme
de la graphie.
La première année du Cours moyen sera d’abord
employée à la révision des acquisitions du Cours élémentaire. Cette même année
devra voir débuter les exercices consacrés à la recherche de la rapidité.
« L’école primaire, dit fort justement Vinh Bang, n’a pas senti la nécessité d’une
écriture rapide. Quand le maître dit « Dépêchez-vous
» ce n’est pas une exhortation à la rapidité
du tracé mais plutôt un rappel à l’ordre adressé
aux lents, aux traînards », aux bavards, aux élèves qui perdent leur
temps en faisant autre chose que l’exercice demandé ».[1]
Le rythme du cours moyen n’exige pas
encore la rapidité de l’écriture : il est fait pour l’ensemble de la classe.
Quand le maître donne un exercice écrit, il se trouve toujours des élèves qui
ont fini plus tôt que les autres comme il y en a qui terminent toujours plus
tard. La majorité des élèves suit bien le rythme général.
Mais l’enseignement n’est pas une fin en
soi ; c’est une préparation : le maître, à travers l’enfant d’aujourd’hui forme
l’homme que celui-ci deviendra ; l’homme et aussi le
collégien qu’il sera deux ou trois ans après. Ce collégien, avons-nous vu, aura
besoin d’une écriture rapide. L’adulte, lui aussi dans la majorité des cas,
aura besoin de cette rapidité.
Bien
que rapide, l’écriture doit rester lisible ; la rapidité ne doit pas être
obtenue aux dépens de la qualité.
C’est jusqu’à présent sur la qualité que l’on
note les devoirs d’écriture imposés aux élèves ; c’est que le contrôle de
la qualité est facile. Il suffit de se reporter à un modèle, généralement si
parfait qu’il est impossible à reproduire. Seuls les calligraphes
professionnels peuvent arriver à cette perfection.
C’est
la raison pour laquelle nous avons tenu à donner dans notre méthode d’écriture
cursive des modèles écrits et non dessinés : nous pensons que les exigences du
maître ne doivent pas porter exclusivement sur la perfection des formes.
Une
écriture sera jugée « belle » si elle est régulière, chaque lettre étant bien formée, ni trop grosse, ni trop petite, si les boucles sont bien verticales
ou ont toutes la même inclinaison. L’épaisseur
du trait doit lui aussi être régulier : l’écriture ne doit être ni trop
fine, ni trop grasse. La largeur moyenne de chaque lettre doit être raisonnable
: l’écriture ne doit pas être étalée (peu
de mots dans une ligne) ; elle ne doit pas être serrée (un trop grand nombre de
mots dans la ligne). L’espacement entre
les mots doit être toujours le même, ni trop grand, ni trop petit.
En
un mot, le terme RÉGULARITÉ résume
la qualité de l’écriture : régularité des formes, régularité des pentes, régularité
du trait, régularité des espacements. Une écriture est belle quand elle est
régulière car elle satisfait en nous le sens de l’équilibre et de l’harmonie.
Il
est donc possible d’avoir une belle écriture sans posséder un don particulier,
celui qui fait les futurs calligraphes.
C’est
ce que le maître doit faire comprendre à ses élèves : tout le monde, tous les
élèves normaux, doivent être capables de « bien écrire ».
Une mauvaise écriture peut provenir de troubles psychiques ou moteurs.
La mauvaise écriture, dit Vinh Bang, doit être considérée comme une inadaptation
scolaire. Le maître se doit de signaler au psychologue scolaire ou au médecin
inspecteur ceux de ses élèves qui présentent des anomalies trop grandes dans
leur graphie car elles peuvent provenir de troubles pathologiques qui ne sont
pas du domaine scolaire.
Il
nous faut maintenant définir ce que l’on peut entendre par la RAPIDITÉ de l’écriture,
en ne perdant pas de vue que cette recherche de la rapidité s’applique à des
enfants de 9 à 11 ans.
Il
y a d’abord des limites à la rapidité : la notation habituelle des mots ne peut
être faite à toute vitesse ; elle ne peut toujours suivre le débit du langage
qui peut, lui, devenir extrêmement rapide. C’est la raison pour laquelle l’homme
a inventé un (et même plusieurs) autre système de notation des mots : la STENOGRAPHIE
qui permet de noter rapidement le langage parlé.
Pour
les apprenties sténographes, il existe un
entraînement méthodique à la vitesse. Une certaine vitesse est demandée aux
examens professionnels ; des championnats sélectionnent les sténos les plus
rapides.
Il ne peut donc être question de
concurrencer les sténographes : écrire à toute vitesse, c’est écrire mal. Il
est indispensable d’écrire vite et bien, et ce résultat ne peut être acquis du
premier coup.
Cette recherche de la vitesse et de la perfection
se retrouve également dans le domaine du sport. On ne naît pas champion ; on ne
le devient pas du jour au lendemain. De nombreuses séances, des années d’entraînement
sont nécessaires. C’est petit à petit que les
athlètes acquièrent les qualités
requises, c’est progressivement que leurs temps
s’améliorent.
Il
en est de même pour l’écriture. Cette comparaison entre l’enfant et l’athlète
doit être faite par le maître à ses élèves afin qu’ils soient bien pénétrés de
cette idée de progressivité de l’effort. C’est progressivement qu’augmentera la
rapidité de l’écriture en conservant le souci de la qualité.
Cela
est essentiel : la qualité doit demeurer la même : l’enfant doit également être
pénétré de ce critère de perfection.
La
recherche de la rapidité ne doit pas consister dans le chronométrage du temps
mis à écrire une phrase ou un paragraphe, mais le temps étant fixé, dans le
recul de la distance.
Le problème n’est pas de savoir qui court
le 100 mètres
dans le temps le plus bref mais de connaître qui va le plus loin dans un temps donné.
La
leçon d’écriture dure généralement u quart d’heure dans les programmes.
Dans
ce temps limite, au cours élémentaire, l’élève devait faire de son mieux, c’est-à-dire,
tout en acquérant les mécanismes nécessaires, avoir le souci de la perfection
de la forme, l’exercice écrit étant non seulement limité dans le temps, mais
également limité quantitativement.
Au
cours moyen, une fois terminée la révision, l’exercice écrit restera toujours
limité dans le temps ; il ne le sera plus dans la quantité. Mais il ne devra
pas devenir une épreuve de championnat. Il ne faut pas jouer à qui écrira le
plus de lignes dans le temps de la leçon. L’élève devra garder le souci de la
perfection de la forme ; aucune limite
ne lui sera tracée quant au nombre de lignes à écrire.
L’élève devra toujours se comparer à
lui-même. Un double barème sera pris en considération pour noter son exercice écrit : une note sera donnée pour la
qualité de l’écriture, une note pour la rapidité (celle-ci dépendant du nombre
de lignes écrites). La note moyenne résultant de ces deux notes servira à juger
le devoir écrit.
Le
graphique des notes moyennes permettra à l’élève de juger des progrès
accomplis.
C’est
là un moyen simple et rudimentaire. Pour les maîtres auxquels ce procédé ne
donnerait pas satisfaction nous conseillons un moyen de contrôle plus rigoureux
et plus rationnel : les barèmes et échelles d’écriture, les barèmes quantitatifs
servant à mesurer la rapidité d’exécution, les échelles à évaluer la qualité[2].
Les leçons consisteront en la copie d’une
phrase qui tient dans une ligne de cahier. Les phrases seront variées à chaque
exercice de manière à revoir toutes les difficultés d’écriture. Elles seront
progressivement allongées de manière à tenir sur deux puis sur trois lignes du
cahier.
Tous
les deux mois par exemple à la phrase toujours la même à reproduire sera
substitué une copie prise dans le livre de lecture courante. Dix minutes seront
consacrées à la copie, cinq minutes à la recherche des fautes.
Enfin, tous les trimestres, le maître
pourra organiser entre tous les élèves de sa classe un concours de vitesse et
de qualité sur le type du test Piscart décrit par Vinh Bang à la page 37 de son
livre. Nous rapportons ci-après l’intégralité de ce texte. Celui-ci devra être adapté par le maître si les élèves
écrivent au stylographe ou au crayon à bille.
Technique élaborée par R. PISCART :
I.
- A tous les degrés, les élèves écriront à l’encre.
N.B. — Avant l’épreuve, les encriers seront
vérifiés.
II. - Chaque élève sera pourvu :
A. — D’une
feuille de papier à deux lignes avec interligne — au degré inférieur ; à une ligne
à partir de la première année du degré moye ; en tous cas, adopter la réglure
habituellement employée dans la classe en fin d’année scolaire.
Cette feuille portera
Dans le coin gauche du haut... (nom, âge, née d’études,
localité, etc.).
B. — D’un porte-plume
convenable muni d’une bonne
plume, d’un buvard.
III. - La phrase à
écrire sera la suivante :
« Mes
enfants, respectez vos parents qui sont si bons ; soyez toujours bien gentils
pour eux, jamais ne leur faites du
chagrin. »
Elle
sera écrite au tableau noir ; les élèves l’apprendront par cœur, par audition
ou lectures successives. Leur attention sera attirée sur l’S dans faites », « toujours » et « jamais ».
IV. - Quand tous les élèves connaissent très
bien le texte, leur dire : « Vous allez écrire de votre mieux et sans traîner,
la phrase que nous venons d’apprendre. Quand je dirai « Partez » vous commencerez.
Quand vous aurez fini une première fois, vous recommencerez sans aller à la ligne
jusqu’à ce que je dise : « Halte ».
Placez vos feuilles dans la bonne position.
Trempez vos plumes dans l’encre.
Relevez les porte-plumes.
Rappelez-vous : écrire de votre mieux et ans traîner.
Attention... partez. »
V.
-
Accorder juste 2 minutes (deux minutes) et faire cesser tout le monde au signal
d’arrêt.
VI.
- Réunir les copies en
paquets d’après l’année d’études et les remettre au chef d’école.
(Tiré de l’Echelle
objective d’écriture pour écoliers belges d’expression française, par R.
Piscart, p. 18-19. Ed. Nauwelaerts, Louvain et Vrin, Paris, 1950.)
Notons
également que les exercices graphiques (que nous avons nommés graphismes),
peuvent être poursuivis au cours moyen. Nous conseillerons au maître de les inclure
dans le programme de dessin en leur donnant une allure nettement décorative.
Nous
avons parlé plus haut de la recherche des fautes graphiques. Un laps de temps
succinct doit toujours être consacré après la leçon d’écriture à cette
recherche des fautes, véritable méthode auto-corrective conseillée par Vinh
Bang dans son livre*. Citons-le (page 132) :
Le contrôle s’effectue comme suit :
1) L’élève souligne lui-même les lettres, les mots qu’il considère comme
mal écrits.
2) Le maître revoit ces corrections et signale les nouvelles fautes.
3) L’attention du maître comme de l’élève se porte sur les lettres mal formées
et les liaisons défectueuses. »
[2] Voir VINH BANG : Evolution de l’écriture
de l’enfant à l’adulte.
source de la première image : http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/education/201012/09/01-4350954-apprentissage-de-lecriture-un-remue-menage-simpose.php
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