23 juin 2012

Nuls en maths !

Nous sommes nuls en maths et ce, dès la maternelle.

Programmes défectueux, formation insuffisante, préjugés pseudo-scientifiques et on obtient une école maternelle incapable d'enseigner les premières bases de l'arithmétique de manière cohérente, progressive et sensée.

Analyse sur le forum Neoprofs de la situation par Catherine Huby, co-auteur de Compter, Calculer au CE1 qui sortira cette année aux éditions du GRIP un manuel d'enseignement des mathématiques pour la Grande section de maternelle : Se repérer, Compter, Calculer en GS :

Anouchka : Quels manuels ou fichiers me conseilleriez-vous pour des ce1 très faibles
Lysimaque : Si ce sont des CE1 vraiment très faibles, Reprendre Compter Calculer CP en accéléré au premier trimestre puis continuer avec Compter Calculer CE1 est une très bonne remédiation. Mes CE1 en début d'année ne savaient pas, même en comptant sur leurs doigts, réaliser des opérations aussi simples que 2 + 3 ou 4  - 2.
Vudici : Comment est-ce possible d'en arriver là? Ils n'ont pas fait de maternelle?
Catherine Huby :
Oh, tu sais, les mathématiques en maternelle...
Il faut déjà trouver dans quel domaine elles se cachent, c'est dans "Découvrir le monde".
Après on doit aller voir jusqu'au cinquième sous-domaine, après "Découvrir les objets", "Découvrir la matière", "Découvrir le vivant" et "Formes et grandeurs".

Et quand on a trouvé enfin "Approcher les quantités et les nombres", il faut sauter tout ce qui concerne l'apprentissage de la suite des nombres, appelée aussi "chaîne numérique", car la maternelle constitue une [période décisive] (c'est eux qui le disent) dans son apprentissage (il faudrait m'expliquer ce qu'il y a de résolument novateur à faire lire à des bébés ou post-bébés ce qui pour n'est qu'une suite de chiffres isolés puis groupés de façon bizarre avant même qu'ils ne puissent avoir ne serait-ce qu'une vague idée de la numération de position).
On peut aussi sauter tout ce qui concerne la désignation (représentation de la quantité par un mot énoncé ou un symbole écrit).

Alors, si on interprète ce qu'ils disent dans le bon sens, celui qui permet à un élève arrivant au CE1 de calculer de tête 2 + 3 ou 4 - 2, on s'aperçoit qu'en effet, il est fait plusieurs fois allusion à des [distributions, comparaisons, appariements], [problèmes posés par l'enseignant de comparaison, d'augmentation, de réunion, de distribution, de partage] (tiens, ils ont oublié la soustraction, dans la liste), [problèmes qui constituent la première entrée dans l'univers du calcul].

Mais, comme c'est noyé au milieu de tout le reste et surtout de cette file numérique de 1 à 30 qu'il faut savoir lire et écrire (sans rien y comprendre, j'insiste...), personne ou presque ne le voit.
Surtout que par ailleurs, en bons constructivistes, les auteurs suggèrent que [la taille des collections, le fait de pouvoir agir ou non sur les objets sont des variables importantes que l'enseignant utilise les situations aux capacités de chacun], histoire d'introduire de l'abstrait pour "le sens" et de la différenciation pour l'immense majorité qui n'est pas prête à "découvrir seule une procédure qui permettra de comparer le nombre de marrons ramassés dans le parc à celui des trombones posés sur le bureau de la directrice au deuxième étage" et que ça, ça affole toute personne qui a tenté une fois d'intéresser tout le monde à cette fichue scrogneugneu de situation-problème où tous les élèves finissent par se chamailler LE marron qu'ils ont repéré tous les deux sauf le matheux de service trépigne en disant qu'il suffit de les compter et d'écrire le nombre sur un bout de papier avant de monter l'escalier !

Et comme en plus, histoire de rendre ça encore un peu moins compréhensible par tous et de rassurer GrosRaton et Barbichette, qui préfèrent faire des ateliers philo en maternelle plutôt que de leur donner quelques repères complémentaires sur le monde (en gros, l'écriture réputée stérilisante par ces éminents penseurs de l'école maternelle) , maîtres et élèves, on ajoute que [les problèmes constituent (certes) une première entrée dans l'univers du calcul mais (que) c'est le cours préparatoire qui installera le symbolisme : signes des opérations, signe "égal" et les techniques.]

Et c'est ainsi qu'ils arrivent au CP en récitant douztrèzcatorzquinz ou vintedeuvintetroivintecinkvintesètrente, qu'ils savent écrire 6... euh non 9... euh non... ou alors 13... euh non 23... euh non 31... euh non jesépa, mais n'ont jamais eu l'occasion de jouer à mettre deux jetons dans une boîte, puis encore trois et de "calculer tout seuls, comme des grands" combien il y a de jetons en tout, dans la boîte, d'abord en les ressortant un à un, puis plus tard en les associant chacun à un doigt de la main, une boule du boulier et enfin en disant "deux et trois, ça fait un... deux... trois... quatre... cinq ! Deux et encore trois, c'est cinq !"

Et si toutefois, ils ont quand même eu quelques occasions de pratiquer ce genre d'exercices, on leur a consciencieusement interdit cette fois l'accès à une symbolisation bien plus simple de prime abord que celle qui consiste à aligner dix symboles dans un ordre précise, puis de les combiner par groupes de deux de manière totalement obscure pour un tout-petit. Pourtant, tous ceux qui ont essayé dans leurs classes savent qu'un enfant de cinq à six ans peut très bien, après l'avoir constaté de visu, en touchant les objets, apprendre à dire que "deux jetons et encore trois jetons, ça fait cinq jetons" et à écrire cela sous la forme 2 + 3 = 5.

D'autres textes de Catherine Huby :

L'apprentissage des gestes de l'écriture liée   et   Enseigner l'écriture liée de la PS au CP

La dictée à l'adulte : la "rédaction à l'école maternelle

B-A, BA et apprentissage de la langue (L'utilisation de Borel-Maisonny n'est pas dangereuse pour la santé, bien au contraire)

Lecture : le régime enrichi

Le constructivisme et la main à la pâte sont les deux mamelles de l'échec scolaire en science, telle est la thèse défendue par Catherine Huby dans ce texte polémiquement jouissif.

Pauvre Shéhérazade ! A propos de l'article "L’écrit douloureux de Shéhérazade, candidate à l’enseignement"  (blog Interro écrite) qui montre les difficultés de maîtrise de la langue française d'une étudiante préparant les concours de professeur des écoles, Catherine Huby propose un commentaire passionnant. 

Lecture en grande section : présentation du manuel de Thierry Venot, De l'écoute des sons à la lecture (GS).

L'école maternelle : une proposition de programme d'enseignement ambitieux pour l'école maternelle.

Nuls en maths ! (les élèves n'apprennent pas bien à calculer à l'école)

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