LA
LEÇON D’ECRITURE AU COURS ELEMENTAIRE
C’est
au cours élémentaire (de 7 à 9 ans) que commenceront les véritables leçons d’écriture.
Nous
avons déjà vu que de nombreux maîtres, sans toutefois négliger cette
discipline, n’y attachent pas toute l’importance qu’elle mérite.
L’écriture
est révélatrice du psychisme : elle est le reflet du développement mental et
intellectuel de l’enfant. Chez un enfant normal, elle présente un rapport
certain avec les acquisitions de lecture : c’est la raison pour laquelle les
enseignements de la lecture et de l’écriture doivent rester liés et aller de
pair.
Pour
lire il est nécessaire de former d’abord la représentation mentale du mot que l’on
regarde avant de le prononcer. L’enfant qui apprend à lire est d’abord
incapable de former d’un bloc cette image mentale du mot tout entier : il le
décompose soit en syllabes, soit en deux ou trois parties selon sa rapidité d’assimilation.
Pour
écrire, le même processus est nécessaire : l’image mentale du mot à écrire
vient commander les gestes de la main. Cette image se forme plus facilement
dans le cas de la copie puisque la forme graphique du mot se trouve sous les
yeux de l’élève. Dans la dictée, l’enfant doit d’abord faire appel à sa mémoire
pour former l’image du mot ; l’acte d’écrire est alors une anticipation mentale
du tracé qui prévoit les lettres à écrire, leur ordre et la manière de les
tracer.
On
est capable d’écrire rapidement un mot si l’on peut former d’emblée l’image mentale
de ce mot.
C’est
pourquoi nous ne saurions trop recommander même dès le cours préparatoire, l’enseignement
de la lecture silencieuse et de la dictée silencieuse afin d’habituer l’enfant
aux représentations mentales des syllabes et des mots que l’on choisira très
simples au début afin qu’ils soient parfaitement accessibles aux enfants.
LECTURE SILENCIEUSE
Le
maître écrit par exemple le mot ROBE
au tableau ; les élèves regardent le mot ; le maître l’efface et interroge un
élève qui doit prononcer à voix haute le mot que le maître vient d’effacer.
DICTEE SILENCIEUSE
Le
maître écrit le mot ROBE au tableau, puis il l’efface. A son signal, les élèves
doivent l’écrire rapidement sur leur ardoise et la montrer afin que le maître
puisse contrôler le résultat.
Le
maître montre l’image d’une robe ;
les élèves doivent écrire le nom sur l’ardoise ou le cahier. Il est nécessaire
de présenter des images ne permettant aucune équivoque quant au nom de l’objet
représenté.
Ces exercices de lecture et de dictée
silencieuses seront gradués afin de suivre les progrès de l’élève. Il
appartient à chaque maître qui connaît les limites intellectuelles et les
connaissances de sa classe d’en doser progressivement les difficultés (du mot
simple à la phrase).
L’enseignement
de la lecture et de la dictée silencieuse facilitera l’acquisition des automatismes
de lecture, desquelles dépend en premier lieu l’automatisme de l’écriture.
L’enseignement
d’une écriture rationnelle viendra immanquablement faciliter cette
coordination, car il permettra à l’enfant de s’exprimer au moyen d’une graphie
avec autant de facilité qu’il s’exprime par le langage.
C’est pourquoi l’éducation gestuelle de la
main est essentielle. L’éducation du langage se fait depuis la plus tendre
enfance : progressivement l’enfant répète les mots qu’il entend autour de lui,
les assimile, et s’en sert pour exprimer sa pensée. L’éducation du geste
graphique commence beaucoup plus tard avec les gribouillis, puis les dessins. L’apprentissage
des lettres et leur assemblage vient apporter au petit homme un nouveau moyen d’expression
: le langage graphique qui lui servira toute la vie. Il est donc extrêmement
important que l’éducation de sa main lui permette d’acquérir l’habileté et la
rapidité qui lui donneront la possibilité de s’exprimer facilement au moyen de
l’écriture.
C’est
pourquoi nous ne saurions trop souligner l’importance de la méthode.
L’apprenti qui veut acquérir un métier ne
l’apprend pas n’importe comment : une mauvaise formation professionnelle ne
produit p s de bons ouvriers. Une formation professionnelle mal conduite se
traduit par une perte de temps considérable pour arriver au résultat.
Il en est de même pour l’écriture. Une méthode
d’écriture ne s’improvise pas : elle ne dépend pas de la fantaisie du maître ou
de la succession des chapitres d’un livre de lecture courante ; elle ne s’acquiert
pas avec le certificat d’aptitude pédagogique. Trop de maîtres « enseignent » l’écriture
sans avoir pensé le problème, sans avoir réfléchi à toutes ses conséquences : l’enseignement
que l’on donne à l’enfant doit avoir pour but de former l’homme ; sa
justification lointaine doit être présente à l’esprit de l’éducateur.
Il est certain qu’à sept ans l’enfant n’a
pas besoin d’écrire vite : sa perception visuelle graphique est lente ; il n’a
pas encore assimilé toutes ses connaissances de lecture ; il n’a pas acquis
entièrement les automatismes nécessaires.
Il est
pourtant indispensable de lui apprendre à écrire cursivement. L’apprenti chauffeur acquiert d’abord
les mécanismes qui lui permettent de conduire l’automobile lentement ; ces
acquisitions lui permettront, plus tard, de conduire la voiture à cent à l’heure
; de même l’enfant ct besoin d’apprendre à sept ans, les principes d’une
écriture qui lui permettront, plus tard, d’écrire rapidement et lisiblement.
Le maître du Cours élémentaire doit donc d’abord
se soucier de la méthode. Il ne devra pas être trop exigeant quant aux
résultats. Il y a toute une évolution dans l’éducation de la main pour l’acquisition
de la maîtrise du geste ; d’abord malhabiles, les tracés se perfectionneront et
s’affirmeront avec le temps. L’enfant s’en rendra compte lui-même, et comme il
est amoureux de la perfection, il voudra faire des progrès et réussira à toujours
mieux faire.
Jean Le Gal, dans l’ « Éducateur », conseille d’établir un planning-lancement comme le
fait Le Bohec, instituteur du C.P.-C.E. 1 (Voir supplément à l’Educateur du 10 février 1964 : « L’écriture
»).
Les
leçons d’écriture devront être courtes : l’enfant se fatigue vite d’écrire. La
première ligne est souvent plus appliquée que la dernière et l’on connaît le «
truc » de cet instituteur qui faisait commencer ses élèves par la dernière
ligne, puis l’avant-dernière etc., pour que l’on puisse croire à un progrès au
cours de la leçon.[1]
Il
est préférable de ne pas punir l’élève dont l’écriture est défectueuse : une
telle écriture est révélatrice de troubles que le maître devrait analyser et
corriger (s’ils sont de son domaine). Il est absurde de punir l’élève dont l’écriture
est mauvaise en lui donnant des pages d’écriture à faire, ou des lignes : c’est
aller à l’encontre du résultat recherché, car il est certain que ces pages
seront de plus en plus mal écrites, et l’élève prendra en horreur les leçons d’écriture
qui lui valent ces punitions.
Enfin il nous faut également combattre l’habitude
de certains maîtres : donner des « lignes » à faire pour punir les élèves
indisciplinés. De très jeunes enfants ont ainsi parfois vingt-cinq, cinquante
ou cent lignes à écrire, travail qui est au-dessus de leurs forces. Donner des
lignes est le moyen assuré de gâter l’écriture
des enfants : les bons éducateurs ont à leur disposition d’autres moyens pour
obtenir une bonne discipline.
Nous avons vu que dans notre méthode, les
lignes d’écriture précédées d’un astérisque doivent être tracées en levant la
main le moins possible. Ce sont presque de véritables « graphismes » (dans le
sens où nous l’avons déjà défini).
Il
n’est pas interdit, afin de faire acquérir à l’élève du cours élémentaire une
sûreté de main plus grande, de lui donner à exécuter de temps en temps une
série de graphismes tels que nous les avons conçus dans notre cahier n° 0.
Il
conviendra de les choisir de manière qu’ils se rapprochent de la graphie de la
lettre étudiée. Certains peuvent être compris comme une composition décorative.
source de la première image : http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/education/201012/09/01-4350954-apprentissage-de-lecriture-un-remue-menage-simpose.php
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