Les exactions turco-islamistes à Afrine ne laissent présager rien de bon. Lorsque les jeunes combattantes kurdes au courage admirable sont capturées par les djihadistes, elles sont torturées, éventrées et leurs seins tranchés.
Ci-dessus, une exécution de prisonniers par des enfants-soldats de Daech. Le presque-califat ottoman d'Erdogan (République islamiste de Turquie) soutient les terroristes de Daech et d'autres groupes terroristes islamistes contre les Kurdes de Syrie, alliés héroïques de la France dans la guerre contre Daech dont les attentats ont causé 200 morts et des milliers de blessés rien qu'en France.
"Il m'arrive de prendre part à des combats. Un jour, nous sommes partis pour un village dont il fallait évacuer les habitants. Deux groupes participaient à l'opération: le premier avançait au fond du village en repoussant les islamistes, et le second évacuait les civils. Je faisais partie du groupe qui chassait les djihadistes. Une fois dans leur base, nous avons découvert qu'ils tenaient dans l'esclavage sexuel des fillettes de moins de dix ans", a dit Joanna Palani.
L'invasion, par la Turquie, de la région kurde
d'Afrine, dans le nord de la Syrie, appelle une réaction de la diplomatie
française, plaident les auteurs Stéphane Breton, Pascal Bruckner, Gérard
Chaliand, Patrice Franceschi, Bernard Kouchner et Sophie Mousset.
Le 21 janvier 2018, l'armée
turque appuyée par des groupes djihadistes bien connus pour leurs crimes
de guerre et leur ancienne allégeance à Daech a lancé une invasion nommée
«Rameau d'olivier» contre la région kurde d'Afrine.
Limitrophe de la Turquie, située au nord-ouest de la Syrie,
Afrine est une enclave de peuplement kurde très ancien d'une soixantaine de
kilomètres de long, séparée du reste des Kurdes de Syrie par l'armée turque et
les milices islamistes. C'est en raison de son isolement que la Turquie se jette
d'abord sur elle, voulant peut-être régler le «problème kurde» comme elle a
jadis réglé le «problème arménien». Elle prétend que la présence immémoriale
des Kurdes menace son intégrité territoriale. Elle justifie l'invasion qu'elle
vient de lancer contre ceux qu'elle appelle des «terroristes» - alors qu'ils se
sont battus avec une détermination exemplaire contre les terroristes islamistes
- par des considérations relatives à sa sécurité. La Turquie a parfaitement
raison de vouloir défendre ses frontières, mais celles-ci n'ont jamais été
menacées par les Kurdes de Syrie. Le régime turc inspiré des Frères musulmans
craint moins les islamistes, auxquels il n'a cessé d'apporter de l'aide, qu'il
ne déteste les Kurdes, nos alliés dans la guerre contre le terrorisme. La
France perdrait les acquis de trois ans d'engagement dans la région si elle
laissait l'invasion turco-islamiste réussir. Plusieurs raisons devraient l'en
empêcher.
Les Kurdes de Syrie sont nos amis. Les abandonner après nous
être battus avec eux contre les islamistes serait une
faute morale impardonnable. Elle contredirait tout ce que la France représente.
Nous le paierions un jour au prix fort. Il y a trois ans, lorsque le président
de l'époque avait reçu les Kurdes de Syrie à l'Élysée après leur victoire à
Kobané pour leur exprimer le soutien de la France, cela avait été très bien
perçu par l'opinion. Les Français savent qui sont leurs alliés dans la guerre
de Syrie et que l'enjeu n'est pas seulement local mais concerne aussi leur
pays. Les Kurdes de Syrie sont aussi les vainqueurs des islamistes qui ont
causé chez nous les pires attentats de notre histoire. La capitale de Daech en
Syrie, d'où ces attentats avaient été lancés, a été prise par les Kurdes en
octobre 2017.
Que se passera-t-il demain si on laisse les djihadistes
gagner cette manche?
Maintenant que les combats font rage à Afrine, les Kurdes
doivent dégarnir leur front contre Daech et cela n'est pas à notre avantage.
L'invasion turque a des conséquences négatives sur la lutte contre le
terrorisme et joue contre les intérêts occidentaux - auxquels la Turquie,
pourtant membre de l'Otan, ne prête guère attention. Que se passera-t-il demain
si on laisse les djihadistes gagner cette manche? Les exactions
turco-islamistes à Afrine ne laissent présager rien de bon. Lorsque les jeunes
combattantes kurdes au courage admirable sont capturées par les djihadistes,
elles sont torturées, éventrées et leurs seins tranchés. Une telle barbarie est
insoutenable. Nous serions comptables devant l'Histoire si nous laissions
continuer cela.
Les Kurdes sont en outre nos seuls alliés dans la région et
ont montré leur efficacité sur le terrain. Si nous les abandonnons, il n'y aura
plus personne sur place pour nous aider à contenir toute nouvelle éruption
terroriste dirigée contre nous.
L'invasion turco-islamiste va créer de surcroît de nouvelles
tensions avec les réfugiés. Des dizaines de milliers de gens vont tenter
d'échapper à la guerre. La Turquie prétend nous protéger d'un afflux de
migrants en échange de notre silence, mais elle fait tout pour que leur nombre
augmente. Enfin, les Kurdes de Syrie sont en train de bâtir une société
démocratique respectueuse de pluralisme ethnique et confessionnel et de
l'égalité entre les hommes et les femmes. Cela aura une influence profonde dans
une région déchirée par la tyrannie. Notre pays devrait encourager ces efforts
qui s'inspirent des valeurs politiques et de la liberté qu'il a toujours
défendues.
La France s'honorerait de demander un cessez-le-feu à Afrine
et le retrait de l'armée d'invasion. Elle doit le faire pour défendre ses
intérêts et la paix dans la région.
Les signataires sont Stéphane Breton, Pascal Bruckner,
Gérard Chaliand, Patrice Franceschi, Bernard Kouchner et Sophie Mousset.
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du
15/02/2018.
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Publié le 14/02/2018 à 18h35
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