Par Etienne Jacob Mis à jour le 20/06/2017 à 20:01 Publié le
20/06/2017 à 19:43
Si le port d'arme est interdit pour les particuliers, il est
possible d'obtenir une autorisation de détention, en cas de pratique de la
chasse ou du tir sportif. C'était le cas d'Adam D., auteur de l'attentat raté
sur les Champs-Élysées, lundi.
Un arsenal. Mardi, les forces de l'ordre ont saisi pas moins
de neuf armes au domicile d'Adam D., auteur de l'attentat raté sur les
Champs-Élysées. Cet islamiste radical, fiché S, était un adepte du tir sportif.
Il avait obtenu son autorisation de manière totalement légale, en 2012. Et
pourtant, en France, la législation est stricte puisque le port d'arme est
interdit pour les particuliers. «Seuls quelques dizaines de citoyens
extrêmement menacés» possèdent ce droit, explique au Figaro Laurent-Franck
Lienard, avocat spécialiste du droit des armes. «Autrement, le port d'arme est
réservé à titre professionnel aux fonctionnaires de l'État, des collectivités,
aux douaniers, etc.», liste-t-il.
En revanche, il est possible d'obtenir une autorisation de
détention d'arme. «Elle permet de l'acheter, l'avoir chez soi et d'aller au
stand de tir ou à la chasse avec», indique Laurent-Franck Lienard. Pour les
adeptes du tir sportif, il est nécessaire d'adhérer à un club. Il est
obligatoire de fournir un certificat médical d'aptitude à cette pratique.
Ensuite, il faut suivre une formation pendant six mois, donnée par le club. Une
partie est théorique et concerne le maniement, la sécurité, ou encore la
législation. S'en suit une formation pratique où des «tirs contrôlés» doivent
être régulièrement effectués. Au bout de six mois, le club peut - ou non -
délivrer un premier avis préalable.
» Lire aussi - Champs-Élysées: fiché S, le terroriste
possédait une autorisation de détention d'armes
Mais la décision finale de l'attribution de l'autorisation
revient à la préfecture. Cette dernière impose de fournir plusieurs
justificatifs, comme la preuve de possession d'un coffre-fort pour y ranger la
future arme. «Au domicile, elle doit être démontée et mise en sécurité»,
précise Laurent-Franck Lienard. L'administration mène ensuite une enquête se
basant sur le fichier du traitement des antécédents judiciaires (TAJ), «qui
permet de savoir si le demandeur a été cité comme auteur d'infraction une fois
dans sa vie», selon l'avocat. «L'administration est très restrictive»,
assure-t-il.
Licencié depuis 2011 à la Fédération de tir, Adam D. ne
possédait pas d'antécédents psychiatriques. Il était inconnu du TAJ, et ne
faisait pas encore l'objet d'une fiche S. Il ne présentait donc, à ce
moment-là, aucun danger pour les autorités.
Débat sur le renouvellement
Depuis 2014, cette autorisation est renouvelée tous les cinq
ans. «Mais révocable à tout moment», affirme Laurent-Franck Lienard. «Les
détenteurs doivent tous les ans remplir certaines conditions: s'il y a un
mauvais comportement, s'il ne renouvelle pas sa licence de tir sportif, le club
prévient la préfecture», certifie Philippe Crochard, le président de la
Fédération française de tir.
En 2015, après plusieurs voyages en Turquie, Adam D. a fait
l'objet d'une fiche S. Deux ans plus tard, en février 2017, il a fait sa
demande de renouvellement. Comme le prévoit la procédure, une enquête a été
effectuée sur lui par la DGSI, qui n'a pas jugé utile de lui retirer son
autorisation. «Si on lui opposait un refus de renouvellement alors qu'il était
inconnu de la justice, cela allait attirer son attention alors qu'il était sous
surveillance», selon une source proche du dossier.
Néanmoins, la décision de la DGSI suscite la polémique. «On
ne peut pas comprendre qu'on laisse des armes à quelqu'un qui est fiché S, on
ne peut pas prendre ce risque», déplore Yves Gollety, le président de la
Chambre syndicale des armuriers. Laurent-Franck Lienard, lui, est plus modéré:
«Il faut raison garder sur ce sujet. La fiche S est le marqueur d'un danger
potentiel. Mais plein de fichés S ne seront jamais dangereux. Le terroriste
avait un casier judiciaire vierge même s'il fréquentait certains milieux. Le
fait d'être un danger potentiel n'enfreint en rien la loi et ne peut empiéter
sur le droit, et notamment celui à détenir une arme.»
Quatre catégories d'armes
En France, les armes sont classées en quatre catégories
différentes. La première (catégorie A) contient des armes automatiques comme
les fusils d'assaut. Elles sont interdites en France pour les particuliers.
Seules les armes de guerre dont le modèle est antérieur au 1er janvier 1946, et
dont la neutralisation est garantie, sont soumises à une autorisation de la
préfecture.
La catégorie B regroupe des armes de poing, d'épaule, à
impulsion électrique ou les bombes lacrymogènes. Elles nécessitent une
autorisation de la préfecture pour être achetées. Trois armes de cette
catégorie - deux pistolets Sig-Sauer 9mm et Glock 9mm ainsi qu'une carabine -
ont été saisies au domicile du terroriste.
La catégorie C comprend notamment des armes d'épaule
semi-automatiques, ou des armes à air comprimé. Il est possible de les acheter
librement mais il est obligatoire de les déclarer à la préfecture.
L'administration peut évidemment s'opposer à la détention de l'arme. Dans ce
cas, le demandeur est notifié qu'il doit s'en dessaisir, puis doit le
justifier. S'il ne le fait pas dans un délai de trois mois «les services de
police interviennent», explique Laurent-Franck Lienard. Au total, six armes de
catégorie C ont été retrouvées chez Adam D.
Enfin, les armes de catégorie D sont généralement en vente
libre. Il s'agit de bombes aérosols, de couteaux ou d'armes historiques et de
collection datant d'avant 1900.
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