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IMPORTANCE DE LA DICTÉE
in La langue française par la dictée
DESSAINT DOUILLET, RINGOT
Librairie Gedalge 1934
APPLICATION DE LA MÉTHODE (livre du maître)
I. LA DICTÉE. — La veille, le professeur lit la dictée. À la
maison ou en étude, l'élève, se reportant à son propre livre, se
remémore le sujet du texte lu ; il examine (mémoire visuelle); épelle
(mémoire auditive) et écrit (mémoire graphique) les mots d'orthographe
d'usage, étudie à l'aide du LEXIQUE le sens des mots qui lui sont
signalés ; puis il revoit dans l'EXPOSÉ GRAMMATICAL, les règles dont il
aura à faire l'application. En un mot, il prépare sa dictée. À l'heure
du cours, le professeur relit le texte, s'assure par quelques
interrogations que le travail de préparation a été consciencieusement
fait ; puis il dicte le fragment. La curiosité de l'enfant, qui
comprend, est en éveil ; son amour-propre est en jeu : muni des éléments
fournis par son livre, il peut faire, il fait un excellent travail.
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source : Evaluation cinquième : le niveau* monte.
(* le niveau d'antagonisme des arguments officiels contradictoires, bien sûr)
Risques de divisions sur l'évaluation de l'évaluation ?
http://michel.delord.free.fr/eval5.pdf
http://education.blog.lemonde.fr/2009/12/15/mouvement-lyceen-et-declin-de-lorthographe/
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La liquidation discrète de la dictée
On a exactement le même
processus de liquidation discrète pour la question de la dictée : comme pour la
division que l'on dénigre en en précisant de moins en moins le rôle et la place
dans l'apprentissage, le programme de Février 2002 ne définit aucun aspect
positif à la dictée tout en ne précisant ni sa place ni son rôle dans
l'apprentissage. Dans le BO des nouveaux programmes, les seules références
à la dictée, c'est-à-dire pas la "dictée à l'adulte" mais à
la véritable dictée non préparée dont parle Claude Duneton (voir infra )
sont des références négatives : on y apprend seulement en effet ce à quoi … la
dictée ne sert pas, ce qui est la négation de la notion même de programme
puisque doit y figurer ce qui doit être appris :
- page 44 : " L’écriture
d’un mot que l’on ne sait pas encore écrire permet, en effet, de revenir à une
activité de synthèse qui vient compléter l’analyse. La dictée n’en est pas
le seul moyen."
- page 47 : pour les
problèmes d'orthographe : "la dictée ne peut tout régler".
La similitude est flagrante entre la position du
ministère sur la dictée et sa position sur la division car il dénigre ces deux
activités sous des prétextes assez grossiers qui ne sont pas les rôles
fondamentaux qu'avaient ces deux activités : sous le prétexte que la dictée se terminait par une note portant sur
l'orthographe ou que l'apprentissage de la division permettait de trouver un
résultat numérique, des gens quand même spécialement payés pour réfléchir à ce
qu'est l'enseignement en sont arrivés à déduire que la dictée ne servait qu'à
apprendre l'orthographe et que l'apprentissage des opérations ne servaient qu'à
trouver le résultat.
source : Evaluation cinquième : le niveau* monte.
(* le niveau d'antagonisme des arguments officiels contradictoires, bien sûr)
Risques de divisions sur l'évaluation de l'évaluation ?
http://michel.delord.free.fr/eval5.pdf
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Mouvement lycéen et déclin de l'orthographe
Sur le Blog de Luc Cédelle, interro écrite, un débat intéressant sur l'orthographe lexical et grammatical : http://education.blog.lemonde.fr/2009/12/15/mouvement-lyceen-et-declin-de-lorthographe/
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Pour former de bons lecteurs, il faut prendre son temps.
Les
premières leçons doivent donc être étudiées très lentement. Toute
l’année, il est important de faire de fréquents retours en arrière. Et
je demande même aux parents de refaire le soir les exercices de lecture
faits en classe.
En
classe, je demande à chaque élève une lecture intégrale de la page de
la veille, toujours à voix haute. Cette activité se déroule en trois
fois une demi-heure.
Les
lectures à lire à la maison sont assorties de dictées préparées,
étudiées et déjà copiées en classe. Ces dictées, toujours tirées de la
leçon en cours, sont graduées pour aller du très facile au plus
difficile.
L'apprentissage de l'écriture et de l’orthographe doit être simultané à celui de la lecture.
Il
est bon également d’y associer des dessins (NDLR : On apprendra par
exemple le mot « pomme » en le lisant, en l’écrivant, en remarquant les
deux « m » et en dessinant une pomme.).
Pour les exercices de calligraphie, je demande aux élèves d’utiliser d’abord un
crayon à mine tendre (2B) afin de pouvoir gommer. Quand ils atteignent
une bonne maîtrise, je leur fais utiliser des stylos à bille. J'ai
longtemps proposé à mes élèves d'écrire à l'aide d'une plume d'acier
mais cette pratique n'est plus possible depuis le changement de
mobilier : il n’y a plus de logement réservé à l'encrier de porcelaine,
qui pourtant passionnait les élèves et les obligeait à prendre beaucoup
de soin.
Au
cours des premières semaines, j'exécute moi-même les lignes des élèves
les plus maladroits, de sorte qu'ils n'ont plus qu'à repasser. Je suis
extrêmement attentif aux tracés. J'exige dans cette activité, de la
précision dans le geste et toute la concentration nécessaire à cette
tâche délicate. Je m'attarde en particulier longuement sur la tenue du
crayon et la posture du scribe sur sa chaise. C'est d’ailleurs notre
premier quart d’heure du matin, celui où je suis sûr d’avoir toute leur
attention.
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DICTIONNAIRE DE PEDAGOGIE 1887 BUISSONArticle Dictée - Auteur Charles Defodon . Tome I de la première partie, pages 702 à 704. http://michel.delord.free.fr/dp-dictee.pdf
Article Dictée - Auteur J. Dussouchet. Tome I de la deuxième partie, pages 588 à 589. http://michel.delord.free.fr/dp-dictee.pdf
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LA BONNE METHODE DE DICTEE - CE1
La Librairie des écoles
source : http://www.lalibrairiedesecoles.com/livre/la-bonne-methode-de-dictee-ce1,24
LA BONNE METHODE DE DICTEE a fait ses preuves : premier cours par correspondance français, créé en 1885, il applique depuis sa création la même méthode de dictée structurée, progressive et intelligente, qui a formé parmi les grands noms de la littérature comtemporaine ; Jean d'Ormesson, Jean-Paul Sartre, Yann Queffélec, Françoise Sagan, Jacques Laurent, Emmanuel Le Roy-Ladurie....
Son secret ? Une dictée quotidienne préparée, dans laquelle tous les mots ont auparavant été appris par les élèves. Chaque mot est expliqué, épelé puis copié, ce qui permet aux élèves de progresser en toute confiance. Grâce à l'actuelle directrice du cours Hattemer par correspondance, Catherine Jousse, la Librairie des Ecoles modernise aujourd'hui son contenu pour en faire profiter tous les élèves de CE1.
LES PARTICULARITES DE LA METHODE
- 140 dictées quotidiennes méthodiques et progressives à raison de quatre par semaine.
- Tous les temps et tous les modes conjugués enseignés dès la fin du CE1.
- Des mots de vocabulaire nouveaux tous les jours, à épeler et à copier.
- Grammaire, orthographe et conjuguaison sont enseignées à partir de chaque dictée
Très bien conçu
Par
R. Ana Enseignante je cherchais différentes dictées bien conçues pour mes élèves.Et là je suis très contente de mon achat ; différents types de
dictées, différentes difficultés. Des exercices de préparation adaptés
au niveau demandé.Un très bon petit livre
goût de la dictée
Par
Marcussy (cergy)
Je donne quotidiennement une petite dictée à ma fille qui bien que bonne élève fait beaucoup d'erreurs d'étourderie. Elle se rend ainsi compte qu"elle ne fait pas attention à ce qu'elle fait et fait depuis bien moins d'erreurs.
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Eloge de la dictée
"Pendant les années 50, les gens voulaient être intelligents à tout
prix. Il y eut un grand vent d’intelligence qui souffla partout. La
décennie 40 ayant été particulièrement obtuse, une sorte de faux pas
tragique dans le siècle le plus éclairé, le plus en progrès de
l’histoire de l’humanité, on éprouvait un besoin de compensation.
Il faut dire que la connerie à l’ancienne avait poussé un peu loin le bouchon, en effet... Le maréchal Pétain, enfermé à l’île d’Yeu, n’en finissait pas de s’attarder parmi nous comme un remords : la bicyclette et l’intelligence furent donc, alors, les deux petites reines des Français. On analysait tout, tous les trois pas on se demandait quelle était la signification du premier, et du second, en relation avec le quatrième qui allait venir – ce fut naturellement une sorte d’âge d’or de la pédagogie. La mode devint qu’il ne fallait plus faire, dans les écoles, que des choses strictement intelligentes : il fallait tout expliquer, tout comprendre au fur et à mesure. C’était extrêmement louable. Afin de mieux raisonner on décida de désencombrer la mémoire des enfants, de rompre radicalement avec l’enseignement millénaire et moyenâgeux des apprentissages « par cœur » – une expression qui signifiait jadis « en pensée », mais dont le mot «cœur » sentait à présent l’irrationnel... En même temps, donc, que les nouvelles méthodes de lecture intelligente s’implantaient, les vieux exercices qui faisaient appel à la mémoire commencèrent à être regardés de travers par les enseignants et débarrassèrent peu à peu le plancher des classes. C’était une bénédiction de voir disparaître les listes de dates historiques, les résumés à réciter le matin toutes affaires cessantes ; un courant d’air frais rajeunit considérablement les manières d’enseigner. Le revers de toutes ces bonnes choses, c’est que les enseignants ont pris soudain, l’habitude du « planter, récolter », et perdu peu à peu le sens du mûrissement... Ce qu’acquiert un enfant ne se transforme pas forcément en « résultats » quelconques au cours de la semaine suivante. Il y a des choses qui l’imprègnent, et qui le transforment peu à peu d’une manière imperceptible – et donc inattribuable à qui ou à quoi que ce soit. Alors, bon, en reléguant le « par cœur », on a aussi relégué – parce qu’elle n’avait aucun résultat immédiat – la récitation traditionnelle de textes. La « récitation » : fables, monologues, extraits de pièces, poèmes... Elle est très vite apparue comme un exercice vieillot destiné à orner l’esprit tout en formant le sens civique des écoliers de la Troisième République, et progressivement, sans le dire tout à fait, au bon gré et au bon cœur de chacun, elle est finalement tombée en désuétude à peu près entièrement. A mon avis c’est une erreur considérable, car c’est priver le jeune individu d’une partie très importante de ce bain de langue qui permet l’assimilation intuitive, l'osmose des termes, des structures, du rythme, de tout ce qui fait la vie d’une langue. On a supprimé ce qui est peut-être le plus important relais de la transmission orale. On l’a abandonné au moment même où l’on aurait dû le renforcer beaucoup pour compenser les pertes « en rabâchage » occasionnées par les méthodes de lecture analytiques – lesquelles auraient sans doute donné alors toute leur efficacité, et entière satisfaction. Cela dit, étant donné le manque de réflexion chronique dont les responsables de l’éducation font preuve au sujet de la langue à enseigner, tant qu’on n’a pas épuré le mythe, le grand mythe de la langue française qui dévore nos petits enfants, génération après génération, il vaut peut-être mieux que l’on ne fasse plus de récitation du tout – ça limite au moins les dégâts... Je suis, pour des tas de raisons, qui tiennent aussi à l’expérience, persuadé que la récitation de textes (sous une forme qui peut être tout à fait rajeunie !) est un des plus puissants, remèdes que l’on puisse appliquer aujourd’hui à la crise de l’enseignement du français – et persuadé aussi que c’est le remède le plus dangereux à manier. Tant qu’on n’aura pas commencé à répondre à la question : « Quelle langue enseigner ? », il vaut mieux, et de loin, ne rien réciter.
Un autre des exercices ultra-classique que l’on s’est mis à négliger, sans en connaître, heureusement, la véritable portée, c’est la dictée. La dictée n’a jamais eu, contrairement à ce qu’on pense, un intérêt bien considérable pour l’apprentissage de l’orthographe... Et encore il faut distinguer entre la dictée vraiment enseignante, expliquée tout du long, et la dictée dite « de contrôle », la plus pratiquée, celle où l’on comptait les fautes à la fin, et les points – et qui ne servait à rien ! Au moins en ce qui concerne la graphie de la langue, car elle avait un rôle très important on revanche – je dis bien en revanche, car c’en est une ! –, un rôle généralement incompris et peu soupçonné : insuffler dans l’inconscient des gosses une dose de langue française qui l’alimentait d’une manière des plus subtiles et des plus efficaces, parce que détournée. Ces textes d’une dizaine de lignes, choisis la plupart du temps, dans les phrases longues de la littérature pour donner une meilleure prise à l’analyse logique qui suivait, étaient d’abord lus lentement dans une sorte d’attention sacrée, rituelle, où chaque auditeur essayait de détailler les mots et les tournures, et de se faire une première idée des difficultés à venir. On vous le faisait ensuite au détail : chaque phrase lue et relue séparément, articulée à l’extrême des possibilités et même un peu au-delà, chaque membre de la phrase soigneusement répété, cinq ou six fois, toujours dans le silence, la tension la plus recueillie, pendant que tous les mots étaient mimés par toutes les glottes, des récepteurs à porte-plume, repassaient muettement par les langues. les dents, et les voiles des palais... Ainsi jusqu’au bout, puis, da capo, on vous rechantait tout le morceau jusqu’à la signature qui était inscrite respectueusement au tableau. A la fin de la demi-heure, un être normalement constitué connaissait le texte absolument par cœur. Gratuitement et en prime. C’était mon cas, je m’en souviens très bien, quand j’étais môme ; certaines dictées me restaient plusieurs jours dans l’oreille, du moins des phrases entières. Eh bien, cette cérémonie constituait une phase privilégiée de l’apprentissage de la langue : la demi-heure sacrée hebdomadaire qui valait à elle seule une semaine de méthode Assimil. C’était une technique d’assimilation involontaire d’autant plus géniale que l’attention consciente n’était justement pas portée sur la langue elle-même, mais détournée sur un objet parallèle : l’orthographe. Ça n’aurait sûrement pas marché aussi bien si l’acquisition avait été la règle du jeu – et si elle avait compté dans la sanction finale que savent mettre les pédagogues à tout ce qu’ils font. Là, c’était merveilleusement gratuit, mesdames et messieurs ! Le petit tour de cirque clandestin pour le plus grand amusement des enfants sages !... J’ai connu plusieurs témoignages d’élèves du secondaire qui m’assuraient avoir appris le français dans les dictées des classes primaires – ce qu’ils en savaient –.
Il faut dire que la connerie à l’ancienne avait poussé un peu loin le bouchon, en effet... Le maréchal Pétain, enfermé à l’île d’Yeu, n’en finissait pas de s’attarder parmi nous comme un remords : la bicyclette et l’intelligence furent donc, alors, les deux petites reines des Français. On analysait tout, tous les trois pas on se demandait quelle était la signification du premier, et du second, en relation avec le quatrième qui allait venir – ce fut naturellement une sorte d’âge d’or de la pédagogie. La mode devint qu’il ne fallait plus faire, dans les écoles, que des choses strictement intelligentes : il fallait tout expliquer, tout comprendre au fur et à mesure. C’était extrêmement louable. Afin de mieux raisonner on décida de désencombrer la mémoire des enfants, de rompre radicalement avec l’enseignement millénaire et moyenâgeux des apprentissages « par cœur » – une expression qui signifiait jadis « en pensée », mais dont le mot «cœur » sentait à présent l’irrationnel... En même temps, donc, que les nouvelles méthodes de lecture intelligente s’implantaient, les vieux exercices qui faisaient appel à la mémoire commencèrent à être regardés de travers par les enseignants et débarrassèrent peu à peu le plancher des classes. C’était une bénédiction de voir disparaître les listes de dates historiques, les résumés à réciter le matin toutes affaires cessantes ; un courant d’air frais rajeunit considérablement les manières d’enseigner. Le revers de toutes ces bonnes choses, c’est que les enseignants ont pris soudain, l’habitude du « planter, récolter », et perdu peu à peu le sens du mûrissement... Ce qu’acquiert un enfant ne se transforme pas forcément en « résultats » quelconques au cours de la semaine suivante. Il y a des choses qui l’imprègnent, et qui le transforment peu à peu d’une manière imperceptible – et donc inattribuable à qui ou à quoi que ce soit. Alors, bon, en reléguant le « par cœur », on a aussi relégué – parce qu’elle n’avait aucun résultat immédiat – la récitation traditionnelle de textes. La « récitation » : fables, monologues, extraits de pièces, poèmes... Elle est très vite apparue comme un exercice vieillot destiné à orner l’esprit tout en formant le sens civique des écoliers de la Troisième République, et progressivement, sans le dire tout à fait, au bon gré et au bon cœur de chacun, elle est finalement tombée en désuétude à peu près entièrement. A mon avis c’est une erreur considérable, car c’est priver le jeune individu d’une partie très importante de ce bain de langue qui permet l’assimilation intuitive, l'osmose des termes, des structures, du rythme, de tout ce qui fait la vie d’une langue. On a supprimé ce qui est peut-être le plus important relais de la transmission orale. On l’a abandonné au moment même où l’on aurait dû le renforcer beaucoup pour compenser les pertes « en rabâchage » occasionnées par les méthodes de lecture analytiques – lesquelles auraient sans doute donné alors toute leur efficacité, et entière satisfaction. Cela dit, étant donné le manque de réflexion chronique dont les responsables de l’éducation font preuve au sujet de la langue à enseigner, tant qu’on n’a pas épuré le mythe, le grand mythe de la langue française qui dévore nos petits enfants, génération après génération, il vaut peut-être mieux que l’on ne fasse plus de récitation du tout – ça limite au moins les dégâts... Je suis, pour des tas de raisons, qui tiennent aussi à l’expérience, persuadé que la récitation de textes (sous une forme qui peut être tout à fait rajeunie !) est un des plus puissants, remèdes que l’on puisse appliquer aujourd’hui à la crise de l’enseignement du français – et persuadé aussi que c’est le remède le plus dangereux à manier. Tant qu’on n’aura pas commencé à répondre à la question : « Quelle langue enseigner ? », il vaut mieux, et de loin, ne rien réciter.
Un autre des exercices ultra-classique que l’on s’est mis à négliger, sans en connaître, heureusement, la véritable portée, c’est la dictée. La dictée n’a jamais eu, contrairement à ce qu’on pense, un intérêt bien considérable pour l’apprentissage de l’orthographe... Et encore il faut distinguer entre la dictée vraiment enseignante, expliquée tout du long, et la dictée dite « de contrôle », la plus pratiquée, celle où l’on comptait les fautes à la fin, et les points – et qui ne servait à rien ! Au moins en ce qui concerne la graphie de la langue, car elle avait un rôle très important on revanche – je dis bien en revanche, car c’en est une ! –, un rôle généralement incompris et peu soupçonné : insuffler dans l’inconscient des gosses une dose de langue française qui l’alimentait d’une manière des plus subtiles et des plus efficaces, parce que détournée. Ces textes d’une dizaine de lignes, choisis la plupart du temps, dans les phrases longues de la littérature pour donner une meilleure prise à l’analyse logique qui suivait, étaient d’abord lus lentement dans une sorte d’attention sacrée, rituelle, où chaque auditeur essayait de détailler les mots et les tournures, et de se faire une première idée des difficultés à venir. On vous le faisait ensuite au détail : chaque phrase lue et relue séparément, articulée à l’extrême des possibilités et même un peu au-delà, chaque membre de la phrase soigneusement répété, cinq ou six fois, toujours dans le silence, la tension la plus recueillie, pendant que tous les mots étaient mimés par toutes les glottes, des récepteurs à porte-plume, repassaient muettement par les langues. les dents, et les voiles des palais... Ainsi jusqu’au bout, puis, da capo, on vous rechantait tout le morceau jusqu’à la signature qui était inscrite respectueusement au tableau. A la fin de la demi-heure, un être normalement constitué connaissait le texte absolument par cœur. Gratuitement et en prime. C’était mon cas, je m’en souviens très bien, quand j’étais môme ; certaines dictées me restaient plusieurs jours dans l’oreille, du moins des phrases entières. Eh bien, cette cérémonie constituait une phase privilégiée de l’apprentissage de la langue : la demi-heure sacrée hebdomadaire qui valait à elle seule une semaine de méthode Assimil. C’était une technique d’assimilation involontaire d’autant plus géniale que l’attention consciente n’était justement pas portée sur la langue elle-même, mais détournée sur un objet parallèle : l’orthographe. Ça n’aurait sûrement pas marché aussi bien si l’acquisition avait été la règle du jeu – et si elle avait compté dans la sanction finale que savent mettre les pédagogues à tout ce qu’ils font. Là, c’était merveilleusement gratuit, mesdames et messieurs ! Le petit tour de cirque clandestin pour le plus grand amusement des enfants sages !... J’ai connu plusieurs témoignages d’élèves du secondaire qui m’assuraient avoir appris le français dans les dictées des classes primaires – ce qu’ils en savaient –.
"A
hurler le soir au fond des collèges", l'enseignement de la langue
française, dialogue Claude Duneton/Frédéric Pagès, page 191 et suiv.,
Editions du Seuil (coll. Points actuel, mars 84)
Éloge de la dictée
Mots clés : dictée, Défense de la langue françaisePar Figaro Claude Duneton Publié
La revue trimestrielle Défense de la langue française publiait
dans son dernier numéro un «éloge de la dictée». Tout ce que dit cet
article chaleureux est entièrement juste, cependant il est un argument
en faveur de cet exercice tant décrié, teinté de nostalgie,
qui n'apparaît jamais : je veux parler du rôle incantatoire de la dictée
classique. Je dis bien incantation, car le cérémonial de la dictée en
français tenait aussi du chant… D'abord, la lecture scandée du maître
prenait un air solennel, avec cette articulation forte et précise,
souvent caricaturée - les moutonsses de Pagnol - mais qui était de
nature à provoquer la plus vive concentration dans une classe.
Le morceau était «choisi» pour la sonorité et le beau balancement
de ses phrases ; il s'agissait toujours d'un extrait littéraire dû à un
grand prosateur. La voix du maître découpait ensuite le chant en
phrases, puis en membres de phrases plusieurs fois répétés, insistants,
martelés - et c'est cette répétition presque psalmodique qui
impressionnait durablement les jeunes cerveaux. Il n'en va pas ainsi
pour toutes les langues : en anglais, on dicte seulement mot après mot,
sans lire préalablement la phrase. Bien sûr ! il n'existe aucun accord,
inutile de relier les mots entre eux puisque chacun porte sa désinence
oralement ; seule compte la graphie, assez anarchique d'ailleurs… En
français, la difficulté - et le charme ! - vient des subtilités
d'accords sibyllins non prononcés. «L'école qu'elle a fréquentée», ce
n'est pas «The school she went to», proposition qui se détaille ainsi
laconiquement: Ve, skoul, chi, ouènt, tou », sans aucune incantation
possible !
À la fin d'une dictée bien conduite - disons bien
psalmodiée -, le gamin normal connaissait le texte par cœur. Il en
goûtait sans le savoir, intuitivement, le rythme et la beauté. Et c'est
cet exercice quasi quotidien qui aidait puissamment à l'assimilation
de la langue, par un «effet secondaire» non prévu et non analysé par les
vieux pédagogues. Le chant clouait la langue dans l'inconscient des
bambins, sans doute bien plus que l'orthographe elle-même. Je demeure
persuadé que dans la période de francisation intensive par l'école,
entre 1890 et 1940 en chiffres ronds, sans la dictée la langue française
n'aurait pas pénétré aussi vite et aussi profondément dans les couches
populaires dialectophones de notre pays.
La tare de l'éducation
nouvelle est de ne tenir aucun compte de l'intuition, de l'impondérable,
et de vouloir tout faire passer par le moule de l'intelligence
abstraite et du raisonnement. Pour les langues, ça ne marche pas. La
preuve !
par Claude Duneton
Le jour ou l’on pourra tranquillement proposer aux Français un
changement de leur orthographe, sans faire de vagues, c’est que nous
aurons franchi un cap décisif de notre histoire nationale : ce jour-là
le français sera mort !
Nous avons assisté, au début de l'année 1991, à un esclandre
fort instructif provoqué par une tentative de réforme partielle de
l’orthographe française. Ce projet, largement répercuté sur les ondes à
renfort de trompettes, n'a pas instauré un véritable débat, mais plutôt
un échange d'injures un peu stérile. C'est dommage, car cette prise de
bec aide à comprendre les rapports spéciaux que les Français
entretiennent avec la langue nationale - à ce propos, je voudrais
ajouter, à ce gros plat orthographique, mon grain de sel.
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