Pour le chercheur Olivier Chopin, spécialiste du
renseignement, les « opérations homicides » relèvent avant tout de la raison
d’Etat qui, par principe, est une négation du droit.
LE MONDE | 04.01.2017 à 06h39 • Mis à jour le 04.01.2017 à
14h00 | Propos recueillis par Gaïdz Minassian
« Ce n’est ni un réconfort ni une excuse, mais la France a
ses « assassinats ciblés » comme nos alliés dans la lutte contre le djihadisme
ont leur targeted killings » (Photo: un drone MQ-1B de l’armée de l’air
américaine lors d’un entraînement au Nevada, en octobre 2015).
Docteur en science politique, Olivier Chopin est chercheur
associé à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) et chargé de
cours à Sciences Po. Spécialiste de la raison d’Etat, il a publié Renseignement
et sécurité, chez Armand Colin, en 2016.
Olivier Chopin.- Les « opérations homicides » sont des
décisions très politiques. En ce sens, l’expression est appropriée. On ne
devrait cependant pas l’utiliser par analogie avec une oligarchie qui se
protège de prétendants au pouvoir, ou avec un régime autoritaire qui emploie
des moyens expéditifs pour éliminer des dissidents, ou encore avec une mafia
qui tue un juge sur le point de prouver la corruption du pouvoir.
Car les djihadistes, puisque c’est eux qui sont visés dans
les opérations « homo » (« homicides ») récentes, ne sont rien de tout cela. Ce
n’est ni un réconfort ni une excuse, mais la France a ses « assassinats ciblés
» comme nos alliés dans la lutte contre le djihadisme ont leur targeted
killings (« assassinats ciblés »). L’expression « assassinats ciblés » est sans
doute plus juste, par la notion de cible, pour restituer la dimension
stratégique de ces opérations.
Lorsque le chef de l’Etat déclare avoir commandité ce type
d’assassinat, qu’est-ce que cela vous inspire ?
De la surprise puis de la perplexité. La surprise vient de
la rupture avec une tradition bien ancrée dans notre histoire. Indépendamment
de leurs positions et de leur style politique, les présidents n’ont jamais
reconnu ni même mentionné les opérations dites « homo » menées par les services
secrets. La perplexité vient des motifs supposés qui ont poussé le président à
parler ainsi de ce sujet à des journalistes. Car il ne l’a pas fait au titre de
la « transparence » pour ouvrir un débat sur une pratique qui devrait cesser.
Il l’a fait pendant...
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