6 juillet 2017

Antisémitisme

Le premier ministre israélien en visite à Paris pour le 75e anniversaire de la rafle du Vel’d’Hiv’ (06.07.2017)
Non à l’instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme (04.07.2017)

Le premier ministre israélien en visite à Paris pour le 75e anniversaire de la rafle du Vel’d’Hiv’ (06.07.2017)
A l’occasion de cette visite en France, la première de Benyamin Nétanyahou depuis l’élection d’Emmanuel Macron, un entretien de travail aura lieu.


Emmanuel Macron et Benyamin Nétanyahou à la cérémonie d’hommage d’Helmut Kohl, le 1er juillet au Parlement de Strasbourg.

Ce sera sa première visite en France depuis l’élection du nouveau chef de l’Etat. Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou se rendra dimanche 16 juillet à Paris pour célébrer le 75e anniversaire de la rafle du Vel’d’Hiv’, les 16 et 17 juillet 1942.


« L’Elysée confirme la venue de Benyamin Nétanyahou, premier ministre d’Israël, le dimanche 16 juillet, pour la commémoration de la rafle du Vel’d’hiv », a annoncé l’Elysée. « A cette occasion, un entretien de travail aura lieu » entre le président de la République, Emmanuel Macron, et le premier ministre israélien.

La France avait organisé en janvier 2017 une conférence internationale sur le Proche-Orient pour réitérer le soutien de la communauté internationale à la solution à deux Etats, israélien et palestinien. M. Netanyahu n’était pas venu, qualifiant l’événement « d’imposture ».


La dernière visite du premier ministre israélien remonte à janvier 2015 quand il avait défilé à Paris aux côtés du président François Hollande pour exprimer sa solidarité après une série d’attaques djihadistes ayant visé Charlie Hebdo, des policiers et des juifs.

Une polémique lors de la campagne présidentielle

Les 16 et 17 juillet 1942, 13 152 hommes, femmes et enfants juifs furent arrêtés à la demande des nazis et sur ordre du pouvoir français en place pendant l’Occupation.

Retenus dans des conditions inhumaines, pendant quatre jours, 1 129 hommes, 2 916 femmes et 4 115 enfants furent entassés dans les gradins du Vélodrome d’hiver (démoli en 1959), voué aux courses cyclistes, avant d’être emmenés dans les camps de Beaune-la Rolande et de Pithiviers (Loiret).


Là, quelque 3 000 enfants en bas âge furent brutalement séparés de leurs parents, déportés les premiers vers Auschwitz via Drancy. Cette rafle représente à elle seule plus du quart des 42 000 juifs envoyés de France à Auschwitz en 1942, dont seuls 811 reviendront chez eux après la fin de la guerre.

Moins d’une centaine des seuls « raflés » du Vel’d’Hiv’ survécurent aux camps nazis, et parmi eux aucun enfant. Cet épisode tragique de la seconde guerre mondiale a fait polémique pendant la dernière campagne présidentielle, Marine Le Pen ayant été vivement critiquée pour avoir affirmé que la France n’était « pas responsable du Vel’d’Hiv’» (position de de Gaulle, Mitterrand, etc. : la France légitime était à Londres), alors même que le président Jacques Chirac avait reconnu la responsabilité française en juillet 1995.

Non à l’instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme (04.07.2017)

Au Parlement de Strasbourg. Photo Pascal Bastien pour Libération 
Le Parlement européen vient d’adopter une résolution de lutte contre l’antisémitisme qui vise aussi les critiques contre la politique israélienne.

  Non à l’instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme

Le 1er juin, le Parlement européen a adopté une résolution sur une cause essentielle et qui mérite un traitement sérieux : la lutte contre l’antisémitisme. Or, cette résolution, qui reprend l’une des deux propositions déposées, celle des groupes conservateurs (PPE), libéraux (Alde) et socialistes (S&D), pose de sérieux problèmes. Elle s’appuie, en effet, sur la définition de l’antisémitisme proposée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, l’International Holocaust Remembrance Alliance (Ihra), dont le grave défaut est de s’écarter de son objet en multipliant les références à l’Etat d’Israël.

Ce n’est pas à un Parlement de définir des notions qui font l’objet d’un vaste débat historiographique et de centaines de travaux critiques. Et le texte de l’Ihra est loin d’être une référence indiscutable. Il affirme d’emblée que : «Les manifestations de l’antisémitisme peuvent inclure le ciblage de l’Etat d’Israël» et mentionne à neuf reprises cet Etat ; même si ses auteurs se voient contraints d’ajouter : «Cependant, une critique d’Israël similaire à celle menée contre n’importe quel autre pays ne peut être vue comme antisémite.» Quand il donne ensuite des «exemples contemporains d’antisémitisme dans la vie publique, les médias, l’école, le monde du travail ou la sphère religieuse», il met sur le même plan quatre exemples de propos haineux, stéréotypés, fantasmés ou négationnistes relevant incontestablement de l’antisémitisme, et sept autres portant sur l’Etat d’Israël, sa «politique actuelle» et ses «actions».

C’est cette définition de l’antisémitisme par l’Ihra que la résolution votée par le Parlement européen invite les Etats membres, les institutions et les agences de l’Union à adopter et à appliquer.

Or, si l’on peut considérer qu’il existe dans certaines attaques formulées contre Israël des dérives antisémites, les critiques de la politique des gouvernements israéliens ne peuvent en aucun cas être assimilées à de l’antisémitisme sans nuire tout à la fois au combat contre l’antisémitisme et contre le racisme, et à la liberté d’opinion nécessaire au fonctionnement de nos démocraties.

C’est ce qu’ont exprimé au Parlement européen les députés de gauche et écologistes (GUE - NGL et Verts - ALE) qui refusent cette instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme et souhaitent inscrire celle-ci dans le combat, essentiel et universel, contre toutes les formes de racisme et de discriminations. Oui, on peut lutter contre l’antisémitisme et défendre les droits des Palestiniens. Oui, on peut lutter contre l’antisémitisme tout en condamnant la politique de colonisation du gouvernement israélien.

La lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations ne se divise pas.

Parmi les signataires :


Bertrand Badie, Etienne Balibar, Fethi Benslama, Sophie Bessis, Rony Brauman, Alice Cherki, Suzanne Citron, Sonia Dayan-Herzbrun, Michel Dreyfus, Ivar Ekeland, Jeanne Favret-Saada, Marcel-Francis Kahn, Catherine Lévy, Gilles Manceron, Gustave Massiah, Elise Marienstras, Fabienne Messica, Véronique Nahoum-Grappe, Emmanuel Naquet, Jacques Rancière, Bernard Ravenel, Carole Reynaud-Paligot, Michel Rotfus, Elisabeth Roudinesco, Shlomo Sand, Michel Tubiana, Dominique Vidal…

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